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L’oncogénétique, une pratique en pleine expansion

L’oncogénétique, une pratique en pleine expansion
Les objectifs de Dre Chiquette sont d’informer les familles, d’offrir un dépistage personnalisé aux femmes atteintes et de donner accès à des services de prévention et de dépistage personnalisés.Photo : Shutterstock

Dre Jocelyne Chiquette, est actuellement médecin omnipraticienne et sénologue au CHU de Québec-Université Laval. Elle est responsable de l’oncogénétique au Centre des maladies du sein Deschênes-Fabia-CHU de Québec-Université Laval, médecin responsable au Centre de coordination des services régionaux de la Capitale-Nationale pour le Programme québécois de dépistage du cancer du sein (PQCDS)-CIUSSS-Capitale-Nationale, chercheuse au Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval et professeure de clinique au département de médecine familiale et d’urgence de la faculté de médecine de l’Université Laval.

Quels sont les éléments qui l’ont mené à se spécialiser en oncogénétique?
Initialement intéressée par la pédiatrie, une belle opportunité professionnelle dirige plutôt Dre Chiquette vers une pratique d’omnipraticienne en oncologie. Elle s’allie donc au Dr Deschênes, alors chirurgien à l’Hôpital du Saint-Sacrement, pour répondre au besoin de suivi des patients en oncologie mammaire. En 1974, elle cofonde avec le Dr Deschênes, la clinique des maladies du sein devenue, en 1997, le Centre des maladies du sein Deschênes-Fabia (CMS). À ce moment, elle est particulièrement intéressée par les aspects liés aux facteurs de risque, au dépistage et à la prévention du cancer du sein ainsi que ses impacts psychosociaux. Depuis 1996, dans la foulée de la découverte des gènes de prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire BRCA1 et BRCA2, Dre Chiquette prend part à un projet de recherche interdisciplinaire mené par le Pr Jacques Simard et portant sur la présence de ces gènes dans la population canadienne-française. Elle travaille conjointement avec une généticienne pour offrir ensuite des consultations aux femmes à risque et cibler celles qui pourraient bénéficier d’un dépistage génétique. Dû à la demande grandissante pour un dépistage génétique, la généticienne, Dre Rachel Laframboise, obtient une autorisation pour que Dre Chiquette puisse prescrire elle-même les tests génétiques de prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire en 2007.

Les objectifs de Dre Chiquette sont d’informer les familles, d’offrir un dépistage personnalisé aux femmes atteintes et de donner accès à des services de prévention et de dépistage personnalisés. En plus des stages effectués avec la Dre Laframboise et dans le but de répondre aux questions qui sont soulevés au quotidien dans sa pratique, elle effectue un impressionnant processus d’auto-apprentissage ciblé en assistant à de nombreux congrès sur la génétique des cancers, en faisant des lectures pertinentes et en participant à des formations en ligne. Dre Chiquette a donc développé son expertise et sa pratique unique en oncogénétique par ce qui est, selon elle, « un processus naturel et logique » visant à répondre aux besoins de sa clientèle.

Quel rôle occupe-t-elle dans la sphère de l’oncogénétique?
Dre Chiquette a occupé et occupe toujours un rôle crucial dans le domaine de l’oncogénétique. Afin de répondre à la demande des femmes porteuses de mutation BRCA envisageant une chirurgie préventive, elle joue d’abord l’entremetteuse entre les patientes et les patientes-accompagnatrices avant même que ce titre soit reconnu et officialisé au sein de son organisation. Une patiente-accompagnatrice est une bénévole qui a connu un parcours de soins similaire et qui intègre l’équipe médicale pour accompagner les usagères.

Ce rôle a été structuré dans le cadre du Centre ROSE (Ressources en Oncogénétiques pour le Soutien et l’Éducation) en 2012 puis du Réseau ROSE en 2015, deux projets développés par le Dr Michel Dorval et Dre Jocelyne Chiquette qui participent au projet Parole-Onco ayant permis l’intégration officielle des patientes-accompagnatrices dans la pratique courante du CHU de Québec. Le Centre ROSE a permis de développer des documents d’information pour les personnes consultant en oncogénétique et leur famille et disponibles sur le site de Réseau ROSE.

Elle s’est aussi battue pour que les résonnances magnétiques mammaires soient accessibles pour les patientes pour lesquelles l’examen est indiqué. En tout temps, elle suit de près les nouvelles informations concernant le rôle des variants de signification indéterminée, mieux connus sous le nom de VUS (variant of uncertain significance), dans la prédisposition au cancer du sein pour en informer les patientes visées. Elle a en plus participé à la conclusion d’ententes pour que des services d’accompagnement psychosocial soient offerts aux patientes porteuses d’une mutation sans cancer actif et à l’élaboration des lettres de divulgation du résultat. Après toutes ces années, elle a elle-même mis de côté le suivi en oncologie pour se consacrer entièrement aux consultations génétiques.

Elle collabore maintenant à titre de cochercheuse aux projets de recherche C-MOnGene[1] et PERSPECTIVE I&I[2]. Le projet C-MOnGene vise à évaluer et à documenter les leçons apprises de l’implantation d’un modèle collaboratif en oncogénétique, développé par le CHU de Québec-Université-Laval en collaboration avec d’autres établissements de l’Est du Québec. Le projet PERSPECTIVE I&I vise, quant à lui, à évaluer une nouvelle stratégie de dépistage du cancer du sein adapté au niveau de risque de chaque femme. Finalement, elle dirige la rédaction et la mise à jour des Lignes directrices de génétique et de dépistage du cancer du sein du CMS.

Comment voit-on l’avenir de l’oncogénétique?
Dre Chiquette est persuadée que le domaine de l’oncogénétique est un domaine d’avenir et que la demande de consultations et de tests génétiques va continuer à croître au fur et à mesure du développement de nouvelles applications de l’oncogénétique et de la médecine de précision. D’ailleurs le RUISSS-Université Laval appuie la formalisation du Réseau d’oncogénétique de l’Est du Québec, une démarche appuyée par le Programme québécois de cancérologie. Le CHU de Québec a été nommé responsable de coordonner cette démarche dont Dre Chiquette est la responsable médicale. Dans le futur, des adaptations seront nécessaires afin de répondre aux besoins de la population. Des possibilités envisagées par Dre Chiquette incluent l’implication de plus de groupes de professionnel(le)s de la santé dans la prescription des tests génétiques. Comme il y a relativement peu de généticien(ne)s et de conseiller(ère)s en génétique, des intervenant(e)s non spécialisé(e)s en génétique qui montrent de l’intérêt pourraient être formé(e)s et mis à contribution dans le conseil aux patients et la prescription de tests ciblés pour une pathologie spécifique et aussi pour le suivi des clientèles identifiées à risque. La création d’un microprogramme de santé génétique qui s’adresserait par exemple aux infirmières pourrait aussi être envisagé dans le but de leur permettre d’occuper un plus grand rôle en oncogénétique. Des postes d’assistants pour les généticien(ne)s et les conseiller(ère)s en génétique sont envisagés dans certains milieux. Les infirmières pivot pourraient par ailleurs ajouter une corde à leur arc en unissant leur spécialisation de pratique à une spécialisation en génétique. L’avenir de l’oncogénétique passe aussi par la participation des patient(e)s-accompagnateur(rice)s dont la présence est de plus en plus valorisée par les équipes cliniques et les patient(e)s. La formation continue et la collaboration interdisciplinaire sont aussi des facteurs nécessaires pour fournir un service de qualité à la clientèle à risque.

Finalement, des enjeux en lien avec l’augmentation des demandes de consultation et de tests en oncogénétique vont demeurer présents dans les prochaines années. Ainsi, l’amélioration des trajectoires en oncogénétique devra passer par une augmentation des effectifs spécialisés dans le domaine et par le développement de solutions technologiques. Parmi celles qui peuvent être envisagées, il y a l’augmentation et l’amélioration des consultations virtuelles et la création de bases de données plus performantes. Poursuivre la recherche sera essentiel afin d’optimiser l’implantation de l’oncogénétique et permettre de contribuer à la santé des populations grâce à l’innovation et les données probantes amenées par la recherche.

Il est évident que Dre Jocelyne Chiquette est une personne enthousiaste, dévouée, proactive, persévérante et experte dans son domaine. Elle est reconnue pour ses implications et elle n’hésite pas à s’investir activement dans plusieurs projets d’envergure. Elle a d’ailleurs été récipiendaire de nombreuses distinctions dont le Prix Innovation pour le Centre ROSE remis en 2016, le Prix Cancérologie remis en 2016 au Centre ROSE, le Prix « DIAMANT » dans la catégorie « RAYONNEMENT » remis en 2014 à l’équipe du CCSR de la Capitale-Nationale du PQDCS pour le développement du site internet depistagesein.ca, le Prix Femme de mérite catégorie santé remis en 2014 au gala de la YWCA et le Prix Personnalité de l’Hôpital du Saint-Sacrement remis en 2013 au Gala Saphir.

À PROPOS DE L’AUTRICE

Jade Ouellet
Université Laval
Promotion 2023
Membre de l’équipe de recherche C-MOnGene

Je voudrais aussi remercier Rachel Guérard pour le travail exemplaire de recherche d’informations et pour avoir rendu possible la rédaction de cet article.

RÉFÉRENCES

[1] Lapointe J, Dorval M, Chiquette J, et al. A Collaborative Model to Implement Flexible, Accessible and Efficient Oncogenetic Services for Hereditary Breast and Ovarian Cancer: The C-MOnGene Study. Cancers. 2021;13(11):2729. doi:10.3390/cancers13112729

[2] Brooks JD, Nabi HH, Andrulis IL, et al. Personalized Risk Assessment for Prevention and Early Detection of Breast Cancer: Integration and Implementation (PERSPECTIVE I&I). Journal of Personalised Medicine. 2021;11(6). 34199804

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