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Soins aux personnes âgées

Soins aux personnes âgées

Photo :  Cristian Newman

Dans une époque de grands changements démographiques, les pressions d’efficacité se font sentir sur notre système de

santé. Le vieillissement de la population apporte des problématiques complexes tant au niveau de l’organisation des soins qu’au niveau de la prise en charge des personnes âgées elles-mêmes, de leurs maladies et de leur environnement psychosocial.

Pour en savoir davantage sur la pratique de la médecine familiale en gériatrie, je me suis entretenue avec Dre Catherine Gagnon, médecin de famille qui pratique actuellement à l’Hôpital Jeffery Hale de Québec. Après avoir travaillé en bureau et en Centre local de services communautaires, Dre Gagnon opte pour la gériatrie lorsqu’elle s’installe à Québec. Sa pratique demeure diversifiée, répartie entre la réadaptation, la gérontopsychiatrie, les soins palliatifs et la santé publique. Elle a collaboré à des projets de prévention des chutes chez les personnes âgées. La médecin affirme avoir toujours eu un intérêt pour le côté humain qu’offre la pratique gériatrique et préfère prendre son temps pour analyser les problématiques de santé complexes auxquelles les personnes âgées font face.

Une clientèle pas comme les autres
Les personnes âgées constituent une clientèle avec des besoins et des problématiques bien particulières. Du point de vue médical, il y a coexistence de plusieurs maladies chroniques, comme l’insuffisance rénale ou cardiaque, le diabète, l’hypertension, les troubles locomoteurs, etc. Il faut aussi savoir jongler avec les troubles cognitifs et psychiatriques, qui requièrent du temps et une prise en charge incluant tous les facteurs psychosociaux significatifs. De plus, il est important de bien comprendre la situation fonctionnelle des ainés et les troubles de santé apportant des limitations physiques qu’il est possible de diminuer ou de compenser.

Une tâche inévitable repose dans la gestion de la polypharmacie de la personne âgée. Le médecin de famille doit, avec l’aide du pharmacien, optimiser l’efficacité des médicaments pour améliorer la qualité de vie, tout en gérant les interactions et les effets secondaires. Il doit prendre le temps d’y réfléchir avec la personne âgée et avec l’équipe interdisciplinaire afin d’améliorer le bien-être des patients. Les médecins qui travaillent en gériatrie font aussi face à plusieurs problématiques éthiques qui requièrent du discernement, une capacité de communiquer et un grand respect envers les décisions des patients. Par exemple, la démence est fréquente chez la clientèle gériatrique, mais rend-elle toutes les décisions du malade caduques? Selon Dre Gagnon, il est important de considérer les volontés du patient et de les confronter aux valeurs du médecin.

Et la santé mentale dans tout ça?
Le vieillissement peut être en soi un processus difficile pour les personnes âgées. Il y a de nombreux deuils à faire, dont la perte de l’image d’un corps jeune et du rôle social. Avec la perte des repères sociaux et les nouvelles technologies, les ainés peuvent se sentir dépassés, tandis qu’une cascade de décès de leurs proches amenuise le réseau social, augmentant leur sentiment de solitude et leur vulnérabilité. « L’histoire de vie nous révèle souvent des pistes pour les aider à faire face à ces pertes. Il reste que cela peut mettre à rude épreuve les mécanismes de défense des personnes âgées même si la plupart des personnes âgées traversent ces périodes avec sagesse », note la médecin de famille.

Pour accompagner les patients dans le processus du vieillissement, il ne faut pas hésiter à rechercher les pathologies qui sont plus aisément traitées si elles sont prises en charge précocement, telle la dépression. Les troubles cognitifs ont aussi des conséquences dramatiques sur les personnes atteintes et leurs proches. Selon Dre Gagnon, une bonne évaluation permet de faire un diagnostic, de préserver le plus longtemps les capacités des personnes atteintes et d’éviter l’épuisement des aidants.

Les enjeux de la pratique en gériatrie
Tout un casse-tête médical que la gériatrie! Les problèmes de la clientèle peuvent être complexes, car il faut établir des liens entre la maladie et le milieu de vie. Or, la récompense est grande : en retour, les ainés partagent leur expérience et leur sagesse. Selon Dre Gagnon, c’est une clientèle qui est en général très reconnaissante et chez qui le médecin peut faire une réelle différence sur la qualité de vie; il y a toujours place à l’amélioration du bien-être des patients, en collaboration avec les autres professionnels de la santé.

Il va sans dire, c’est une pratique qui prend du temps. Or, le système médical actuel impose souvent la rapidité, compromettant parfois la qualité des services. La rareté des ressources et le vieillissement de la population créent un étau qui requiert de la part des médecins une certaine adaptation et une bonne préparation théorique. Les récentes politiques en matière de santé qui favorisent l’accès à un médecin de famille visent à régler un problème réel, énonce Dre Gagnon. Cependant, la façon d’y arriver sans nuance compromet la présence de médecins de famille dans les équipes interdisciplinaires en établissement, par exemple en soins palliatifs, en réadaptation dans les hôpitaux de jour et en gérontopsychiatrie ambulatoire.

Le médecin de famille : la première ligne!
Bien que les médecins de famille collaborent avec les gériatres lors des épisodes de soins aigus, ils sont les intervenants privilégiés, car ils ont la confiance des personnes âgées. Plus de 80 % des ainés voient leur médecin de famille au moins une fois par année. Le rôle du médecin est d’orienter les ainés de façon efficace dans le système de santé, de faire le pronostic des maladies, d’évaluer l’aptitude au consentement du patient et de discuter du niveau de soins avec le patient et ses proches. L’implication de la famille dans le processus de soins est indispensable. Il y a certes parfois des conflits à gérer, mais la famille est primordiale dans le processus de soins, autant pour soutenir le patient que pour corroborer l’histoire médicale. Dre Gagnon ajoute également que le médecin de famille, par son lien privilégié avec les ainés, joue un rôle-clé dans le dépistage de la maltraitance et la protection des personnes âgées vulnérables en raison de maladies.

Conseils à toi, futur médecin de famille
« Garde toutes les portes ouvertes. Sois polyvalent et n’aie pas peur de faire de nouvelles expériences, cela t’ouvrira plus d’avenues et te permettra de varier ta pratique au gré de tes intérêts. La médecine est très exigeante au début, ne te mets pas trop de pression, garde du temps pour toi et évite l’endettement excessif qui te contraindrait à des pratiques moins flexibles. Quoi que tu fasses, tu rencontreras des personnes âgées, à l’urgence, à l’hôpital ou dans ton bureau, et il te faudra connaitre les grands syndromes gériatriques. Enfin, rappelle-toi que le prévention primaire et secondaire est la base de la santé pour des communautés saines et prospères. »


Pascale Laveault-Allard
Étudiante de 2e année
Université Laval

 

Cet article utilise l’orthographe moderne recommandée.

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