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La médecine de famille en milieu autochtone

La médecine de famille en milieu autochtone

Le récit d’une externe en quête d’aventure
Tout a commencé au début juillet. Le responsable de notre stage de médecine de famille nous accueille à notre arrivée à Roberval et nous informe qu’il y a possibilité d’aller faire un tour à la réserve la plus proche, soit à trois heures de route sur des chemins de terre, avec un médecin de famille qui y va depuis longtemps. Il précise qu’il n’y a aucune obligation d’y aller, mais que ceux qui ont vécu l’expérience en sont revenus changés. Cette idée me trottant dans la tête, j’ai recueilli de l’information auprès des autres médecins de famille que je côtoyais durant mon stage. C’est là que les stéréotypes et ouï-dire sont parvenus à mes oreilles. Des histoires de malbouffe, de non-observance et de traitements chamaniques m’ont poussée à me questionner sur les vraies conditions de vie et de santé des gens de là-bas. Ainsi, les 5 et 6 juillet 2016, je me suis rendue à Obejiwan, une réserve autochtone d’environ 2 500 habitants. Après la longue route, qui m’a donné plus de mal des transports que le Goliath, mon patron et moi sommes arrivés au dispensaire de la réserve.

Le médecin que j’accompagnais était un habitué de la réserve. Il y allait quelques fois par mois depuis au moins une dizaine d’années. Des médecins ainsi que des dentistes de Québec venaient à l’occasion à la réserve pour y prodiguer des soins. Je l’ai donc accompagné à sa clinique. Le premier patient était en retard. C’était un patient qui venait pour son suivi de diabète. Une histoire triste à voir. Il ne prenait pas ses glycémies ni ses médicaments à la maison, bien que ceux-ci lui soient offerts gratuitement. Il ne croyait pas aux complications du diabète et refusait son traitement. On l’a alors questionné sur ses habitudes de vie. Il habitait dans une petite maison avec ses enfants et petits-enfants, donc au moins une dizaine de personnes. Ils avaient organisé une cantine de poutine dans leur cuisine et en vendaient aux gens de la réserve. Bien entendu, toute la famille mangeait de la poutine à tous les repas, y compris les enfants. Bien qu’une nutritionniste travaille à temps plein au dispensaire, ses cliniques étaient pratiquement vides. Il était choquant de voir à quel point la population n’était pas éduquée sur les bonnes habitudes alimentaires. Ainsi, pour en avoir le cœur net, je me suis rendue à l’Intermarché du village et j’y ai découvert beaucoup de choses. Sans grande surprise, les fruits et légumes étaient chers. Les aliments crus comme les viandes et poissons étaient présents en très petite proportion comparativement aux congélateurs remplis de repas préparés et aux allées de biscuits et de sacs de croustilles. Le problème était donc causé non seulement par le manque d’éducation, mais aussi par le manque de disponibilité d’aliments sains.

Plus tard, j’ai eu la chance de rencontrer le chaman de la réserve. Ce dernier avait un bureau au dispensaire et travaillait souvent en tant que médiateur entre les patients, les membres de la réserve et le personnel du dispensaire. Les habitants étaient en général méfiants envers les professionnels de la place, les voyant comme des étrangers. Le chaman m’a expliqué que presque tous leurs rituels spirituels ont été déclarés sataniques il y a une cinquantaine d’années. N’ayant plus la chance de se recueillir et de pratiquer leurs traditions ancestrales, les gens ont beaucoup perdu le contact avec la nature, mais aussi avec ce que cela veut dire d’être autochtone. Il m’a parlé d’une cérémonie qu’ils appellent le « sweat », c’est-à-dire la tente à sueur. J’ai eu la chance de visiter cette tente. Le but de l’exercice, un genre de sauna très chaud, est de détoxifier le corps et l’esprit en écoutant les récits des ancêtres. Cette tente était utilisée pour traiter les maladies en combinaison avec les plantes médicinales connues par le chaman. La difficulté avec la médecine spirituelle survenait lorsque des patients cessaient de prendre leurs médicaments pour se traiter uniquement aux plantes médicinales. Encore une fois, un manque d’éducation et d’information était en cause.

En définitive, j’ai vraiment apprécié ma visite en milieu autochtone puisque je peux mieux comprendre l’origine de leurs problèmes actuels. Cela remonte aux générations antérieures de colonisateurs, qui ont imposé leurs façons de faire en interdisant celles des autochtones. Cela a créé une grande méfiance des peuples autochtones envers les Européens de l’époque, qui perdure encore aujourd’hui. Malheureusement, cela rend les contacts entre les peuples très difficiles et le partage de l’information insuffisant. Par contre, ce n’est pas une raison pour abandonner les autochtones à leur sort. Ces gens ont besoin de nous et, personnellement, je trouve d’une grande importance la continuation du travail des médecins de famille dans les réserves. Je vous encourage tous à vous y intéresser aussi !

Roselyne Choinière, équipe 2016-2017
Roselyne Choinière
Étudiante de 4e année
Université de Sherbrooke au campus de Sherbrooke

 

Cet article utilise l’orthographe moderne recommandée.

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